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Christine Lagarde
The President of the European Central Bank
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Discours à l'occasion du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial

Discours de Madame Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne, au Sommet pour un nouveau pacte financier mondial, Paris

Paris, le 23 juin 2023

Merci pour votre invitation à ce sommet important sur le financement de la question la plus urgente de notre époque.

Il y a huit ans, ici à Paris, le secrétaire général de l’ONU, Monsieur Ban Ki-moon, avait ouvert la COP21 en déclarant que Paris devait « marquer un véritable tournant » en vue de limiter le réchauffement mondial à 1,5° C[1].

Le temps dont nous disposons pour atteindre cet objectif se réduit désormais à vue d’œil : les huit dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées dans le monde[2] et il est probable que le seuil critique de 1,5° C d’augmentation de la température moyenne annuelle sera dépassé pendant au moins une année d’ici à 2027[3].

Sécheresses, vagues de chaleur et inondations sans précédent sévissent déjà sur tous les continents. Les souffrances et les dégâts provoqués ne sont encore qu’un aperçu de ce que l’avenir nous réserve. Il est du devoir de chacun de tout mettre en œuvre pour faire en sorte que l’objectif de l’Accord de Paris soit atteint.

Nous le devons non seulement aux futures générations mais aussi aux générations actuelles, devant lesquelles nous sommes responsables. Les pays en développement sont déjà les plus touchés par les effets du réchauffement climatique. Une chose saute aux yeux : ces pays subissent une part disproportionnée des conséquences du réchauffement de la planète. Au cours des cinquante dernières années, plus de 90 % des victimes ayant péri à la suite d’événements météorologiques extrêmes vivaient dans les pays en développement, où plus de 70 % des catastrophes signalées ont eu lieu[4].

La voie à suivre est claire : nous devons faire avancer la transition mondiale afin de nous assurer que nos économies soient prêtes pour l’avenir. Cela signifie non seulement réduire les émissions de gaz à effet de serre en vue de parvenir au « net zéro », adapter nos économies pour les protéger contre le changement climatique, mais aussi nous attaquer aux causes profondes de la grave destruction de la nature qui menace les ressources essentielles dont dépend notre survie. Les recherches de la BCE montrent que, rien qu’en Europe, plus de 70 % de l’économie dépendent fortement des services écosystémiques naturels[5], un chiffre qui est probablement bien plus élevé dans les pays en développement.

Pour relever le défi, nous pouvons actionner au moins trois leviers pour stimuler les financements nécessaires à une transition verte et juste à l’échelle mondiale.

Premièrement, il est du ressort des gouvernements de mener la lutte contre le changement climatique et d’honorer leurs engagements en matière de financement de la transition.

Les économies développées doivent montrer la voie et respecter l’engagement climatique de 100 milliards de dollars pris il y a quatorze ans lors de la COP15 de Copenhague. En outre, les gouvernements devraient mobiliser des fonds privés en mettant en œuvre des politiques de transition et en créant un cadre robuste et stable visant à attirer des flux de capitaux aux niveaux national et international.

Deuxièmement, les gouvernements peuvent donner l’impulsion d’une réforme de l’architecture financière multilatérale.

Le G20, qui est cette année sous la présidence de l’Inde, peut jouer un rôle-clé dans le déblocage de financements supplémentaires. La revue du dispositif d’adéquation des fonds propres des banques multilatérales de développement peut constituer une opportunité à cet égard. Plus généralement, nous devons repérer et supprimer les barrières publiques et privées à la finance verte partout dans le monde où cela est possible.

Troisièmement, les banques centrales du monde entier peuvent et doivent, dans le cadre de leur mandat, favoriser le verdissement du système financier.

Le Réseau pour le verdissement du système financier, qui est composé de 127 banques centrales et superviseurs à travers le monde, a joué un rôle crucial en faveur de l’accélération de l’action mondiale et poursuivra ses efforts dans ce sens.

À la BCE, nous nous sommes également donné pour priorité de tenir compte du changement climatique en raison (i) de son incidence sur l’inflation, (ii) de son incidence sur notre bilan, mais aussi (iii) parce qu’il représente un risque financier pour les banques que nous supervisons. Nous avons ajusté nos avoirs en obligations d’entreprise et modifié notre gestion des garanties et des risques afin de mieux refléter les risques climatiques et d’encourager simultanément la transition verte de l’économie. En tant qu’autorité de surveillance, nous veillons à ce que les banques prennent les risques climatiques en considération dans leurs décisions opérationnelles et d’octroi de prêts. Nous conduisons également des tests de résistance concernant l’incidence du changement climatique sur l’économie et la stabilité financière. A travers nos recommandations, nos analyses et nos actions, nous cherchons à gérer les risques financiers découlant du changement climatique, et démontrons aussi la nécessité de cette transition que je viens d’évoquer.

Ces transformations ont eu lieu sur une période remarquablement courte de quelques années à peine, traduisant l’élan croissant des efforts déployés collectivement pour combattre le changement climatique. La conférence de ce jour témoigne de notre détermination commune à redoubler d’efforts alors que le temps nous est compté pour tenir nos objectifs climatiques.

Nous pouvons maintenir le seuil de 1,5 ° C en unissant nos forces. Comme l’a dit fort à propos Sir David Attenborough, « si chacun dans son coin est capable de déstabiliser notre planète, en associant nos efforts, nous aurons certainement la force nécessaire pour la sauver »[6]. Donnons-lui raison à travers nos actions.

  1. Ki-moon, Ban, « Allocution au sommet des dirigeants de la COP21 », 30 novembre 2015.

  2. Organisation météorologique mondiale, « C’est officiel, les huit dernières années sont bien les plus chaudes jamais enregistrées dans le monde », communiqué de presse, 12 janvier 2023.

  3. Cf. Organisation météorologique mondiale, « De nouveaux records mondiaux de températures attendus ces cinq prochaines années », communiqué de presse no 17052023, 17 mai 2023

  4. Organisation météorologique mondiale, Atlas de la mortalité et des pertes économiques dues aux phénomènes météorologiques, climatiques et hydrologiques extrêmes (1970–2019), OMM-no 1267, mis à jour en 2022.

  5. Elderson, F., « The economy and banks need nature to survive », Le blog de la BCE, 8 juin 2023.

  6. Attenborough, D., « Address to world leaders at the opening ceremony of COP26 », 2 novembre 2021.

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